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LA COUR D’APPEL DE MONS RAPPELLE QU’ELLE NE PEUT COMBLER – A PEINE D’EXCES DE POUVOIR – LES LACUNES LEGISLATIVES NOTAMMENT DANS LE CADRE DE L’APPLICATION DE L’ARTICLE 355 ANCIEN DU CIR 92

Le 02 novembre 2010
LA COUR D’APPEL DE MONS RAPPELLE QU’ELLE NE PEUT COMBLER – A PEINE D’EXCES DE POUVOIR – LES LACUNES LEGISLATIVES NOTAMMENT DANS LE CADRE DE L’APPLICATION DE L’ARTICLE 355 ANCIEN DU CIR 92
La 18ème chambre civile près la Cour d'Appel de Mons présidée par Monsieur STEVENART MEEÛS refuse également de se conformer à la jurisprudence de la Cour de Cassation (27 novembre 2009 + 26 février 2010) concernant l'application de l'article 355 ancien CIR 92 compte tenu de l'article 170 de la Constitution.

Mons, 18ème chambre, 06 octobre 2010, RG 2006/906

En cause de :

L'Etat Belge

Appelant

Représenté à l'audience par Maître Olivier HAENECOUR

Contre :

Madame V.F.

Intimée

Représentée à l'audience par Maître Ludovic TRICART

(...) Attendu que dans le Royaume de Belgique, qui est un grand Etat de droit, toute personne est quitte et libre de toute charge fiscale, à moins que la loi n'en dispose autrement ;

Que l'affirmation de cette règle est l'explication de l'interprétation stricte de la loi fiscale, qui est consacrée par la doctrine et par la jurisprudence des Cours et Tribunaux belges ;

Que la Cour de Cassation décida d'ailleurs elle-même expressément que la règle de l'interprétation stricte est érigée en principe à l'égard de toutes dispositions légales qui, comme les lois fiscales, limitent la liberté des personnes ou constituent une atteinte aux biens des citoyens (Cass., 19 décembre 1948, Arr. Verbr., 1948, p. 620) ;

Que la règle selon laquelle le droit fiscal est de stricte interprétation signifie également que le Ministère des Finances doit, pour lever l'impôt, s'appuyer sur une base légale qui lui accorde de manière certaine ce pouvoir et surtout ne l'exclut pas, ne fût-ce que par la lecture d'une partie de phrase de la base légale invoquée par le Trésor public ; (...)

Attendu qu'il est constant que le présent litige est relatif à une cotisation à l'impôt des personnes physiques rattachée à l'exercice d'imposition 1993 et que, partant, c'est l'article 355 ancien du CIR 92, tel qu'il existait avant sa modification par l'article 20 de la loi du 15 mars 1999, qui doit être déclaré d'application ; (...)

Que l'ancien article 355 du CIR 92, lu dans son entièreté et dans le sens grammatical et usuel des mots, est parfaitement clair et n'est susceptible d'aucune interprétation, de sorte que le recours aux travaux préparatoires d'une loi postérieure est dépourvu de toute utilité ;

Que l'article 355 ancien du CIR (1992) doit être interprété à la lumière des documents parlementaires de cette disposition et non par renvoi aux travaux préparatoires d'une loi postérieure (loi du 15 mars 1999) ;

Que dans un article remarquable intitulé « Petit cours d'interprétation », le regretté professeur Albert TIBERGHIEN écrit : « si l'opinion du législateur lorsqu'il rédigea le texte à interpréter n'amène pas la clarté à son tour, il est permis de rechercher la volonté du législateur dans les lois antérieures, mais jamais dans les lois postérieures » (RGF, 1993, 8-9, p. 213, qui cite aussi les arrêts de la Cour de Cassation du 21 décembre 1953, Pas., 1954, I, p. 333 et Cass., 26 janvier 1954, Pas., 1954, I, p. 464) ;

Que l'interprétation téléologique, qui tendrait à rechercher l'intention du législateur, non pas au moment où la loi a été adoptée, mais si la loi avait été adoptée aujourd'hui, est exclue en matière fiscale ;

Attendu que notre Cour est tenue d'interpréter la loi fiscale de manière restrictive, ce qui exclut toute interprétation des dispositions fiscales par analogie, règle qui trouve son fondement dans l'article 170 de la Constitution ;

Que la Cour est confrontée à une lacune législative - qu'elle ne peut combler, à peine d'excès de pouvoir - privant l'administration de toute possibilité de réimposition, dans les circonstances de l'espèce, à défaut de base légale ;

Qu'en vertu de l'article 170 de la Constitution, le Juge ne peut pas compléter les lacunes en droit fiscal : en vertu de cette disposition et du principe de franchise générale des personnes et des choses, il faut considérer que si la loi fiscale ne régit pas une situation déterminée, c'est que celle-ci n'est pas soumise à l'impôt ;

Que l'appel est non fondé ;

PAR CES MOTIFS ;

La Cour,

Reçoit l'appel ;

Le déclare non fondé ;

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Monsieur F. STEVENART MEEÛS, Conseiller (...)

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